Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

L'été a définitivement tiré sa révérence. On l'a vu s'envoler aux environs de 22 heures et des poussières au Parc de Saint-Cloud. C'était un spectacle étourdissant, serein, dopé à la zik et à la danse, meilleures cames de la terre. Le soleil, levé à Paris, se couchait du côté de l'Australie ce soir-là. Une disparition soigneusement orchestrée et accompagnée par des garçons aux cheveux longs, chemises et t-shirt bariolés qui autant avec leur musique qu'avec leurs fringues semblaient clamer un hymne à l'amour et au psyché. A cette heure précise, Tame Impala embrasait les foules avec des mélodies quasi extatiques. Les australiens semblaient avoir remplacé ce que les anglais et leur rock aurait pu faire par le passé, ils nous semblaient capable de nous dire, à nous petits français, combien ce bon vieux temps n'était pas mort et qu'il pouvait à tout moment refaire surface et nous débarasser de nos élans nostalgiques. Le corps sur un nuage, de la poussière plein les pieds, des jambes en état de décomposition et de la musique plein la tête, voilà comment nous avons quitté la petite prairie de cette grande scène ce soir-là. De l'énergie nécessaire pour affronter la rentrée en plus. C'est une tradition bien parisienne d'assister à ce tableau devenu classique : Rock en Seine referme la parenthèse enchantée de l'été. Pourtant c'est toujours la même rengaine pour le parisien d'adoption : il prend sa place dès mars, la perd très rapidement dans son bureau, oublie l'objet de la perte puis réalise six mois plus tard que « putain c'est Rock en Seine ». L'excitation l'a quittée, parce qu'il est un être ingrat – enfin soyons honnêtes et disons elle. Elle râle de devoir courir porte de Saint-Cloud, râle du temps frais, râle de la prog du premier soir. Puis finit par capituler devant Miossec qui râle lui face au gros son des « punk » de Offspring. Même pas saoûle, non, non, non on l'écoute enchaîner " la mélancolie c'est communiste". Enivrée par la brume de la vie qu'il expertise si bien, on s'inflige un premier questionnement : « qui cause politique aujourd'hui dans la chanson française ? ». Le vieux loup de mer nous emporte à Brest. Tonnerre, que sa voix cassée, son corps disloqué nous avait manqué. Pendant ce temps-là, Offspring amasse les foules et leur rend certainement leur âme adolescente so ninetees, noble travail. Ceux d'aujourd'hui ont mieux à faire. Il s'entasse devant une scène plus petite pour une nuit Fauve. Perdue dans une faune de gamines et gamins qui tétent leurs pompotes, où la compote a été soigneusement remplacé par du rhum, le second questionnement de la soirée rapplique  : « dis-donc grosse conne n'as tu pas aimé ce groupe juste parce que tu étais aussi bancale et amoureuse que ces adolescents ? ». Analyse judicieuse, Fauve traverse aussi bien les hautes lumières de l'adolescence que ces turpitudes niaises. Cela ne nous empêchera pas d'enculer le blizzard tous en cœur et d'avoir des frissons. Autre réflexion déplaisante face à ce spectacle d'une jeunesse rassemblée sous l'étendard de ses fauveries  : « dis donc Fauve c'est pas un rap de blanc incapable d'ouvrir ses frontières aux problèmes moins individualistes ? ». A ce moment, mon corps m'a heureusement dit « ta gueule, tu vas pas la fermer ? » et je suis allée noyée ma tête avec HandBraekes (Boys Noize et Mr Oizo). Le son des deux boys a fort heureusement tabassé les têtes, fracassé les corps et fait perdre quelques tympans. Du clubbing pur et dur où parfois tu regardes ton voisin avec ce regard qui signifie « mais pourquoi ? » avant d'entamer une danse endiablée sans trop comprendre pourquoi et comment ton corps est ainsi capable de gesticuler. Le lendemain, il fallait faire acte de présence malgré un retard considérable pour le démon le plus classieux de la chanson française. Daho dandine toujours ses paroles de haute facture sur des mélodies dansantes et enivrantes. Et on dandine comme lui en se mettant le coeur à l'envers. Non loin de là, Bianca Casady & The CIA faisait ses preuves. Coco avait abandonné pour l'occasion sa sœur, sa moitié (Rosie) pour continuer à bricoler des sons volés à son subconscient. Son tour de chant ressemblait à une maison de poupée où on aurait invité un monstre à venir tout saccagé. Entre le sublime et l'horreur, elle joua avec sa poésie si étrange pendant que des danseurs gesticulaient sur scène. Après ? Après c'était une autre histoire. C'était une redite de l'histoire. C'était plus de la musique, c'était de la légende qu'on entretient bêtement. C'était l'histoire d'un type en solo ou accompagné dont on craint toujours la prestation. C'était un type que certains auraient voulu voir crever et qui aurait certainement voulu s'y voir dans la tombe lui aussi. C'était un type qui se rêvait Rimbaud en Albion mais qui était né à l'époque où il fallait se planter une aiguille dans le bras et faire la une des tabloïds. Dont look at me like that. Compliquez de ne pas faire autrement. Ce soir-là, la foule s'est amassé pour le voir, les voir, les frères ennemis des années 2000 comme Keith et Mick en leur temps. Certains sont pro Cârl, d'autres pro Pete, d'autres acquis à la cause des Libertines, d'autres juste là pour les voir se planter. Les enfants terribles ne se plantent pas. Ils ne brillent pas non plus. Ils font le job sans grand amour du travail bien fait dirons nous. La complicité semble ravivée (pour les besoins du scénario?) mais l’électricité manque un peu. Le caractère brouillon prend le dessus, et pourtant on est là, comme acquis bêtement à la cause, à se dire on y assiste enfin à ce fameux temps du rock'n'roll, celui-là même qui a bien voulu refaire surface à la fin des années 90. C'est comme si Pete et Cârl nous faisait une fleur. Bande de petits veinards vous allez assisté au spectacle de deux enfants terribles qui auraient pû devenir dieux du rock. Et les sales gosses nostalgiques finissent par pardonner ce concert sage aux enfants terribles. Le lendemain, devant des australiens, qu'on appréciait alors pas plus que ça jusqu'ici on s'est souvenu de ce que pouvait, de ce que devait être la musique parfois : une communion où chacun vibre à sa façon, où chacun se réjouit de voir le sourire sur les lèvres de son voisin et du mec accompagné de ses acolytes sur scène. Un truc un peu désuet où la musique pulvérise le temps d'un set toutes tes questions à la con.

Just let it happen
Tag(s) : #Musique, #Rock en seine, #Miossec, #Tame Impala, #Pete Doherty, #The Libertines, #Etienne Daho
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :