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Qui ne craque pas pour l'air du « c'était mieux avant » ? Le présent aime naturellement se lover dans les bras d'époques enchanteresses pour effacer le chagrin de son temps maussade. Il suffit de fouiller un vieil album photos, ressortir quelques fringues vintage des parents et laisser s'échapper la voix céleste d'une Nancy Sinatra sur la platine pour succomber à la tentation des cieux passés. Lana Del Rey est un ange venu de ce royaume. Cette ravissante extra-terrestre, tiraillée entre vulgarité moderne et élégance d'antan, semble descendue tout droit de la planète sixties. Chez elle, hier encore, le drapeau américain flottait sous le souffle d'un vent tragique alors que le président Kennedy était assassiné. Quelques jours plus tôt Rita Hayworth fusillait les cœurs en Gilda et Jean Harlow continuait à jouer de sa crinière platine et de ses formes sexy. Le monde de Lana Del Rey n'est qu'une chimère passée, encore bien vivante dans le cœur de nombreuses personnes. Avec elle, le mécanisme qui bat en nous s'arrête en un instant, le temps se suspend et sa voix nous envoie à l'origine du drame. L'après-guerre, la course-poursuite au bonheur et à la célébrité. L'American Dream dans toute sa splendeur, là où le cauchemar sommeille en chaque lolita pré-fabriquée.

 

LanaDelRey

Lana Del Rey est un nom fabriqué de toutes pièces pour la gloire, comme le reste de sa personne semble-t-il. La nouvelle coqueluche du Net s'appelle en réalité Lizzy Grant, elle a tout juste 24 ans et foule d'icônes figure à son Panthéon personnel. Éprise de Elvis, Britney Spears, Nirvana ou Nina Simone, celle qui se présente comme « Gangsta Nancy Sinatra » concède un faible pour les comètes éphémères nées sous les lumières de la belle Amérique. « Je vis pour le drame dans toute sa splendeur » avoue t-elle dans une interview accordée à Gonzaï. Cette passion pour le drame, la jeune fille la porte en elle. Dessiné sur son visage de poupée boudeuse, sculpté dans sa voix fatale de jeune femme désabusée, le drame s'impose chez elle comme surjoué pour mieux éveiller les soupçons face à un monde où tout n'est que démesure. La jeune diva envoûte avec grâce par son imagerie vintage. Une vidéo, une chanson, une photo d'elle suffit au fantasme. Le Net s'enflamme pour son personnage calqué sur un demi-siècle d'une Amérique camée aux stars flamboyantes ,déchues, éphémères. Est-ce ces créatures qui fabriquent leur destin épique, se laissent entraîner dans la tragédie du star-système ou ceux qui les regardent avec assiduité se casser la gueule ? Lana Del Rey ne donne aucune réponse à l'éternel dilemme dans ses quatre premières compositions mises en ligne en toute discrétion sur YouTube avant le grand buzz. Pourtant chacune d'entre elles, chaque plainte lancinante de la pin up d'un autre temps, ravage les esprits et les rapproche un peu plus du drame et de la splendeur de l'époque.

 

De formation jazz, bercée par des charts dégoulinants de pop et un environnement où le gangsta rap fut un temps roi, Lana Del Rey constitue son style musical comme un patchwork mélancolique des décennies passées où s'entrecroisent multiples divas. L'alchimie est efficace, et ne connait pas (pour l'instant) l'ennui grâce à cette voix à l'aisance miraculeuse jonglant à merveille entre un chant fascinant à la Billie Holiday et une énergie excitante à la Brit-Brit ou à la Madone des hits parades. Mais avec sa bouche outrancière et ses yeux de biches, Lana Del Rey chante d'abord avec son corps. Lorsqu'on la croise pour la toute première fois, on croit l'avoir déjà rencontré, des milliers de fois peut-être. Sur son visage, la bouche outrancière d'Angelina Jolie, le regard perdu de Lindsay Lohan, le duck face insupportable de Britney Spears et de Miley Cyrus, la crinière indomptable de Brigitte Bardot et des décennies entières de jolies filles de passage sur l'écran. Des beautés du diable comme le monde entier en raffole pour mieux les rejeter par la suite de l'histoire. Sur « Video Games », titre magnétique à base d'images d'archives chics et rétros, la demoiselle conte ses amours déçus, et l'arnaque généralisée d'un monde qui se dit « construit pour deux », la vie ne valant alors le coup que si le deuxième veut bien être de la partie. La belle exhibe dans ses poses boudeuses et ses couplets tragiques cette certitude grisante qui veut que le drame est supérieur à la vie. Nul doute que la petite Lizzy Grant a révisé ses classiques avant de débuter dans la chanson. Sa voix dramatique, sublimée par une harmonie de cordes et de cloches, prolonge l'obsession de cette nostalgie exaltante contre laquelle on ne peut lutter. Si « Video Games » donne envie de se noyer dans le chagrin, « Kinda Outta Luck », son second titre, pulvérise les larmes. La jeune fille s'y décrit comme « dérangée » et « dangereuse » et prévient ceux qui l'écoutent : « Vous êtes trop gentils pour ce monde ». La beauté fatale est-elle plus rusée que le reste des lolitas que ce monde-là a justement sacrifiées sur l'autel de la célébrité ? L'Histoire ne tardera pas à nous le dire... En attendant son premier EP est attendu le 9 octobre chez Stranger Records.

 

 

« Video Games » de Lana Del Rey

 


« Kinda Outta Luck » de Lana Del Rey

 

 

 

MySpace de Lana Del Rey

Site Stranger Records

 


Tag(s) : #Musique
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