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Longtemps, j'ai pensé que rien ne valait  César & Rosalie et leur amour nécessaire. Longtemps, j'ai pensé que Romy Schneider ne pourrait jamais être aussi belle que sur une plage de Sète dans les bras de Sami Frey. Mais au cinéma comme dans la vie, il ne faut jamais dire jamais. Car un jour le Père Noël t'offre Les Choses de la vie, et qu'un 26 décembre tu te retrouves en larmes dès 10h00 du mat' à cause de ces choses. La beauté de Romy. La justesse de Piccoli. La musique de Sarde. La caméra ultra réaliste de Sautet. La sérénité d'un cinéma pur et délicat qui pose de belles questions. Auxquelles la vie se refuse de répondre.

 

À l'aube des années 70, Claude Sautet décide d'adapter le roman éponyme de Paul Guimard : Les Choses de la vie. L'histoire de Pierre (Michel Piccoli), un architecte, qui perd le contrôle de sa voiture en pleine campagne. Gisant sur l'herbe au bord de la route, l'homme se remémore son passé, sa vie avec Hélène qu'il désirait quitter, sa femme Catherine et leur fils dont il s'est séparés... Les choses de la vie en accéléré, enfin visibles quelques secondes avant la mort.

 

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Premier film d'une longue lignée dédiée à cette vie où la communication manque et où exprimer des sentiments est un handicap, Les Choses de la vie s'observe comme une existence sur laquelle on se refuse de s'arrêter et comprendre. Si donné qu'il y est quelque chose à comprendre bien entendu. Gisant dans un champ aux allures de paradis terrestre, Pierre revit ces multitudes petites choses de l'existence par flash-back soigneusement choisis. Joies et peines se succèdent alors dans son inconscient bientôt gagné par la mort. Ces joies et peines qui constituent le bonheur de toute une vie.

 

La chose presque banale devient sous la caméra de Claude Sautet et les notes magistrales de Philippe Sarde, la perle rare, le chef-d’œuvre absolu qui vous crèverait le cœur en direct. Car ce portraitiste si précieux qu'était Sautet filme la mort en direct comme jamais auparavant un réalisateur n'avait pris le risque de le faire. Cet arrachement à soi, aux autres, aux souvenirs, à la vie qui vous condamne à vous retourner sur un passé que vous n'avez su comprendre, expliquer, profiter. Pour la première fois au cinéma, Claude Sautet filme un accident de voiture. Mort tragique et immédiate. La caméra sait qu'il y a une signification particulière sous toute cette tôle froissée, sous cette carcasse de voiture qui flambe et ce corps qui gît au sol sous le regard mi-curieux et mi-consterné des badauds.

 

L'une des plus grandes méprises du cinéma se met alors en place. Elle consiste à qualifier le cinéma de Claude Sautet de bourgeois dès l'aube des années 70. L'homme n'appartenait à aucune caste, à aucune école pourtant on l'enferma là dedans sous prétexte qu'il filmait ses couples qui hantaient Paris sous l'époque giscardienne et passaient leurs week-end à la mer. Plus que la bourgeoisie, Sautet filmait la vie avec lucidité et quelques gouttes d'acide. Doux et amers, ces films vous arrachaient au temps. Rien n'y était excessivement appuyé, tout y coulait de source. Les non-dits comme les disputes, les scènes de tendresse comme les drames. La grâce crevait l'écran quand Romy lisait le « Je t'aime » de Piccoli sur sa machine à écrire. La douleur crevait l'écran quand Piccoli écrivait à Romy qu'il ne pouvait accepter de devenir un couple misérable comme la majorité des couples. Tout était dit sans excès. Tout était là sous son œil précieux qui dans la grisaille de la vie tentait coûte que coûte de percevoir ces doux moments pour lesquels elle valait le coup d'être vécu.

 

Songe précieux qui fait la part belle aux regrets éternels d'un homme qui n'a pas su s'abandonner, Les Choses de la vie peuvent être aimé juste pour son titre. Ou pour le nom de son auteur ou celui de son tandem éclatant. Mais non, l'histoire finie on réalise qu'on ne l'a aimé juste pour sa musique. Une musique signée Philippe Sarde. Une petite musique comme la vie. Enivrante et dramatique, inattendue et triste.

 

 

Tag(s) : #Cinéma
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