Y'a de la joie à retrouver Biolay sur scène. Y'a de la joie à la simple idée de le retrouver. Y'a de la joie à déambuler en pleine chaleur sur les grands boulevards pour courir s'enfermer dans une salle d'une autre époque le voir chanter des chants d'une autre époque. Y'a de la joie à fuir le temps juste le temps de quelques chansons. De la joie à réentendre Trenet, le fou chantant, ravivé, réanimé par le type qui prend le plus de risques en tentant l'hommage. « Biolay qui reprend y'a de la joie c'est un peu la blague du siècle, non ? » disent les détracteurs. Réponse d'une inconditionnelle ? Biolay a chanté Ferrat, Maccias, Gainsbourg et même Gorillaz. Bref, l'homme connaît ses origines, la chanson française, cette chose un brin complexe, souvent malmenée, et parfois à côté de la plaque. Cette chose capable de temps en temps de merveilles. Ce tour de chant de deux soirs consécutifs aux Folies Bergères en est une. Une merveille, un témoignage de plus. Le témoignage d'une filiation d'un amour, d'une preuve : la chanson française cette chose précieuse s'échange, se raconte, se chantonne d'une bouche à l'autre, d'une décennie à la suivante et balade avec elle son lot de souvenirs. Biolay s'improvise crooner pour ce soir de douce folie, à moins qu'il l'ait toujours été. Un crooner doux imbibé de Lexomil, d'alcool et de pessimisme consolateur déjà sur Rose Kennedy, son premier. Accompagné d'un orchestre et du guitariste Nicolas Fiszman et le batteur Denis Benarrosh qui l'ont aidé sur cet hommage au fou chantant, devant une salle comble, il chante tour à tour Paris, son bel été, ses coins de rue et ses amours à la volée. Les classiques passent à la trappe. Pas de joie et d'hirondelles encore moins de mer qu'on voit danser. Paris, ses faubourgs, ses brave gens, sa langueur monotone suffisent à bercer nos cœurs. C'est sage comme une carte postale vintage déniché chez un bouquiniste de l'Île de la Cité, doux comme les flots de la Seine en été et séduisant comme un amour parisien. Biolay n'abuse pas de l'image d'Epinal, n'enfile pas le costume du conservateur amoureux de sa vieille France et de sa capitale, ça serait mal connaître le personnage. Non, il ponctue son hommage d'hommages, de remerciements, de sourires au coin - jolies habitudes. Il actualise le grand Charles. Se souvient de chaque coin de rue disparu, de l'enfance qui jouait par là et de cette idée que les chansons passent de génération en génération. Avec sa voix chaude et grave, les cordes qui l'accompagnent, les souvenirs se greffent aux chansons. Devenant de vraies madeleine de Proust. On revoit la première fois de sa vie où on a entendu ce « Coin de rue », cette « Romance de Paris » et ce « Que reste-t-il de nos amours ? ».