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Elle a décidée de tirer sa révérence en plein coeur de l'été. Au moment où on s'y attendait le moins. D'ailleurs est-ce qu'on s'attendait à la voir partir, elle avant quelques autres, rejoindre les Chabrol et Truffaut aussi tôt ? Non, l'égérie de la Nouvelle Vague, aux côtés des Jean Seberg et Anna Karina, a surpris son monde jusqu'au bout. Partie retrouver en douce les petits génies des Cahiers du Cinéma à qui elle devait son premier film Les Mistons (1958). Partie alors qu'elle profitait de nouveaux succès sur grand écran, mère trop bienveillante d'Alain Chabat (Prête-moi ta main), grand-mère adorable chez Julie Delpy (Le Skylab) et dealeuse sur le tard chez Jérôme Enrico (Paulette). Bernadette, elle était très chouette. Une personnalité comme seul le cinéma de l'après-guerre pouvait en produire : une fille rêvassant d'indépendance et de cinéma quand le deuxième sexe commençait tout juste à se réveiller dans un Hexagone sur le point de se reconstruire. Cette chouette fille du sud avait la gouaille d'une Arletty des faubourgs et un franc-parler à toute épreuve. Deux détails qui allait séduire le bon vivant Claude Chabrol avec lequel elle tourna à cinq reprises. Belle brune au physique généreux, elle n'avait pas peur d'oser dans un cinéma français à l'époque sclérosé par la bienséance. Souvent putain sur grand écran c'est en endossant le rôle étonnant de la fameuse maman aux côtés d'un Jean-Pierre Léaud intello déprimé qu'elle frôla le sommet de sa carrière (La Maman et La Putain de Jean Eustache, 1973). Beauté hors norme pour l'époque et vivacité d'esprit indéfectible, réalisateurs et acteurs n'avaient d'yeux que pour elle. Elle était ce type même de fille qui vous capte quoi qu'elle raconte. Il fallait voir le regard éberlué du jeune André Dussolier dans le plus drôle des Truffaut, Une belle fille comme moi (1972), Bernadette Lafont y incarnant une séduisante détenue accusée du meurtre de tous ses amants et racontant à son jeune avocat son innocence comme personne. Ni ravissante petite idiote, ni beauté du diable comme le cinéma en produisit tant, cette fille-là était terrible. Comme aucune autre actrice ne l'était. Comme tant d'autres elle était exceptionnelle, à classer du côté des grandes, celles qui échappèrent aux grandes récompenses et avait l'amour du risque comme unique ligne de conduite (un César seulement pour L'Effrontée de Claude Miller en cinquante ans de carrière). Quelle actrice de plus de 70 ans accepterait aujourd'hui d'endosser un rôle de mamie dealeuse en banlieue parisienne ? Seule, Bernadette Lafont. Une sacré bonne femme, aurait dit Claude Chabrol.

Une belle fille comme moi de François Truffaut

La Maman et la Putain de Jean Eustache

L'Effrontée de Claude Miller

Tag(s) : #Bernadette Lafont, #Cinéma, #Nouvelle Vague, #Truffaut, #Chabrol, #actrice
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