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Lili reçoit une énième carte de son frère (accessoirement son jumeau) disparu depuis quelques mois après avoir claqué la porte du pavillon familiale et de la vie de con qui va avec. Lili lit les quelques mots de son frère, avec le visage dur de ses vingt ans: "Je vais bien, ne t'en fais pas". Les quelques mots du frère deviendront le titre d'un doux mélodrame de Philippe Lioret, sorti sur les écrans à la rentrée 2006.

Étonnant de justesse et de simplicité, ce drame familial est inspiré du roman éponyme d'Olivier Adam. Une histoire de l'an 2000, un modeste pavillon de banlieue parisienne, des parents devant Patrick Sébastien le samedi soir et des gamins qui rêvent à autre chose. Sans artifice et avec des économies de dialogues, Lioret s'immisce dans ce Truman Show, cette France modeste qui tente de vivre correctement et paisiblement à la périphérie. Mère au foyer et père à la cravate impeccable qui ramène de quoi vivre à la fin du mois, voilà le motif de la disparition de Loïc, le frère jumeau de Lili. La jumelle se retrouve seule, amputée de sa moitié, l'être cher. La jeune fille épanouie et commune à toutes les jeunes filles des banlieues pavillonnaires glisse doucement vers un malaise imminent: la dépression. Peu à peu, le beau visage de Lili (Mélanie Laurent) devient pâle et maigre. Le chagrin de cette perte, la violence de cette disparition puis le silence de ses parents conduisent Lili vers l'acte délicat de l'apprentissage de la douleur. La douleur de la solitude hante chaque plan, chaque dialogue, chaque nons dits.

Tout en sobriété, Je vais bien, ne t'en fais pas frappe par sa justesse et sa triste impression de déjà vu. Chronique d'une France qui se lève tôt pour se payer un modeste pavillon de banlieue, le film pose avec délicatesse les problèmes de générations, cette incompréhension entre parents et progénitures, les uns rêvant d'une vie modeste et les autres d'une vie vivante. Cette vie là, Lili la quitte peu à peu, ironise sur son activité de caissière à Shoopi. Elle a abandonné ses études, fait une croix sur l'avenir et refuse l'amour de Thomas. Loïc demeure son unique but... Lili a vingt ans et toute la complication de son âge avec. Elle regarde ses parents avec amour et haine, mélange instable de l'âge qui la pousse à les aimer pour ce qu'ils ont fait pour elle et les détester pour ce qu'ils sont. Le sujet même du film, la disparition de Loïc, n'est que prétexte à dévoiler les tourments de cet âge très attendu et aussitôt regretté, les vingt ans et leur lot de complications et d'incertitudes. Parfois, il faut du temps pour comprendre que les gens vous aime et que les actes maladroits sont généralement nés de l'impulsion d'un amour profond.

Le portrait de Lili et de son environnement prend les airs de documentaire sur la France pavillonnaire. On pose la caméra et on observe. L'observation silencieuse de cette famille comme les autres est éloquente. Un jolie mélodrame où se confrontent les désirs des uns et les incompréhensions des autres. Un mélodrame où les interprétations des acteurs restent en mémoire pour longtemps. Le père (Kad Merad) est loin d'être celui que l'on croît. Quand à la jeune Lili (Mélanie Laurent) elle réussit à livrer une performance impeccable de vérité. Une fille qui fait "vrai" au cinéma, c'est pas tous les jours que l'on voit ça...

 

 

Tag(s) : #Cinéma
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